Games people play / Des jeux et des hommes 1/2

Publié le par Fab

Réactivation du thème "Psycho de bazar", ce soir visite chez mon pote Eric Berne, et son fameux "Games people play", "Des jeux et des hommes" en VF. Déjà évoqué ici.


Loi de Murphy peut-être, mais ces derniers mois ne se sont vraiment pas déroulés comme j'aurais pu le supposer.

Bref, j'ai un container de truc en instance, dont mes chroniques estivales qui n'ont pas été rewritées ni publiées depuis ... des semaines.

Qu'importe, et puis en cette saison, les réminiscences de l'été, c'est toujours bon.

Comme ça, accessoirement, y'avait un -10°C bien tapé hier matin, les routes gelées et des corbaks dans les labours, idyllique !


 

 Billet initié depuis le bord de la piscine du domaine où j'entends plus ce que je n'écoute les conversations des quinquas-sexas liftées et gonflées d'un peu partout et qui sont mes charmantes voisines de bronzette.

Leurs maris s'usant au bureau la semaine, y compris en août, et leurs grands enfants faisant bande à part, ces chipies ont donc des "loisirs" et remplaçant le salon de thé ou de coiffure de nos régions septentrionales, le bord du bassin olympique est de fait l'agora locale.

Bref, "on" se dit tout et "on balance" sur les absent(e)s.

Cela dit, je retrouve ces derniers (les maris) le week-end, et dans le genre, c'est pas mal non plus.

Et, observation purement empirique j'en conviens, mais je constate que moins on porte de fringues, moins contraintes sociales et pudeur font obstacle à la franchise la plus crue.

En bikini minimaliste, c'est du Mireille Dumas en live au bout de trois minutes.


Tout ceci pour en venir aux "Passe-temps " si malicieusement décrits par Eric Berne dans son ouvrage, titre de mon billet, et dont je savoure en silence leur déroulement depuis mon transat.

Je sais, pas charitable.


Les Passe-temps donc ou approche systémique et analytique du ragot et de la conversation convenue.


Vous ne verrez plus jamais les conversations de coktail, de séminaire de cadres ou entre copines du même oeil.


Pour l'aspect conceptuel, si je puis dire, je vous ai fait un mini pitch en bas de page, pour les autres on suit direct en dessous.
Au point de vue purement théorique, Berne définit le passe-temps comme une suite de "transactions" programmées de façon à ce que chacune des parties obtienne en un court laps de temps le maximum de satisfactions possible : confirmation des ses opinions, valorisation de son ego, etc...

En pratique, c'est la conversation, pas la discussion, dont le sujet dépasse la thématique "météo-y-a-plus-de-saisons-ma-brave-dame" qui relève, elle, du rituel.

Les passe-temps sont très importants dans notre vie sociale, car bien souvent à l'origine de nos amitiés sincères et profondes.
Ils permettent de déceler les personnes ayant les mêmes références que les nôtres (sociales, culturelles ou émotives), bref des affinités.

Revue de détail.

 J'ai repris ici les dénominations établies par l'auteur dans les années 60, qui sont fort drôles et très explicites.

Pour la classification,de multiples critères (sexe, âge, situation sociale) sont à disposition.

Je prendrai la plus basique : le sexe des participants, étant entendu que beaucoup peuvent être mixtes.

Côté mecs, on trouvera :

 

"General Motors" : on compare les marques de bagnole, et chacun donne un avis définitif, même si on n'a jamais conduit un seul modèle  de la marque discutée.


"Qu'est devenu  ?"  (ce bon vieux Roger) : souvent pratiqué par ceux qui ont soit bien réussi ou carrément échoué au plan financier dans leur existence. 

"Le Martini" : ou comment se mettre minable. Chacun de proposer sa recette et d'en rajouter sur l'état dans lequel on a fini. Le "Martini" est souvent suivi du "Lendemain matin" qui se passe d'explication je crois.

 "Combien ça coûte ?" :  le propos de bistrot par excellence, (navré, mais pas de ma faute si c'est aussi une émission de TF1 comme quoi...), en usage chez les hommes à faibles revenus.
Quand tu as des thunes, le prix, tu t'en tapes un peu et puis au final,  tu sais parfaitement combien coûte une Béhème série 7 ou un anneau au port d'Antibes.



"Qui a gagné ?" : ah, ça ! J'y ai droit tous les lundis matin (beurk !), à la cafét' de l'usine. Commentaires du championnat de foot du week-end. J'ai d'ailleurs remarqué que, bien que tout le monde ai vu les matchs ou lu l'Équipe dans le métro en venant bosser, les participants posent quand même des questions sur le score.

Côté filles :

Les 3 basiques, pas la peine d'expliquer.

"Les chiffons", "la Cuisine" et "l'Épicerie".

Une séance de "passe-temps" s'amorce presque  toujours par l'un de ces trois.
Du style : "Hier soir j'ai fait du... (plat classique) à mon mari" ou "Oh, c'est mignon ta jupe".

"Comprendre" : ses ados d'enfants, son mari distant ou  Chantal et Michel qui sont en instance de divorce. 
Merci Dolto et
Ruffo !

"Le mari déliquant" : à qui en rajoutera le plus sur son mufle, fainéant, buveur et coureur de mari.
Un grand classique entre copines. Ne niez pas, je vous écoute dans les boutiques de fringues ou à la cafét', vous savez ?



"Vous êtes allé à  ?" : typique des classes moyennes aisées tapant la cinquantaine. On se partage un peu de nostalgie sur sa jeunesse perdue tout en s'assurant que l'on appartient bien à la même classe sociale que les participants (si on évoque Tahiti, évitez de citer Arcachon, vu ?).
 

Les mixtes :

 
"Le Budget" : le passage à l'euro a signé son grand retour. Combien fois ai-je entendu les lamentations sur le caddie qui se remplit moins qu'avant. Je suis incollable sur le prix du brick de lait ou de la tranche de jambon.

"La réunion de parents d'élèves" :  variant de "y'a plus de jeunesse" (en configuration d'échange Parent-Parent) à "j'ai du mal à faire face avec mon grand" (en échange "Adulte-Adulte).



"Dis leur chéri" : jeu de couple, lancé par madame souvent dominatrice et relayé par monsieur agissant en enfant précoce (ce que Berne appellerait une relation symbiotique Parent-Enfant).


A la différence du "jeu" qui finit toujours, comme aux échecs, par un mat du ou des partenaires, le passe-temps s'arrête souvent de lui même quand chaque joueur a eu sa dose de valorisation.

D'ailleurs il est  notable de constater que les passe-temps s'enchaînent les uns après les autres.

Observez-bien comment qui conserversation qui languit se relance.

 

Ex masculin : "Qui a gagné ?" va introduire un "General motors" en évoquant le prix de F1, qui lui même va introduire un "Combien ça coûte?".

 

Ex féminin : Un "Cuisine" va introduire un "Mari délinquant" (le mien est difficile et ne mange que des pâtes) pour rebondir sur une "Réunion de parents d'élèves".

Une dernière chose sur les "passe-temps".

Ils sont extrèmement ritualisés.

Une preuve ?

Avisez-vous de lancer un "Mon mari est merveilleux" en pleine partie de "Mari déliquant" et vous allez voir.

Le top provoc' étant un "Chiffons" ("j'aime bien ta chemise") en plein "Qui a gagné ?" ==> éviction immédiate du trublion, mon grand jeu du lundi matin.

La suite ces prochains jours, nous aborderons les "jeux" stricto sensus.

Bonne nuit.



Bande son : Goldfrapp - Number one


Je ne saurais vous résumer son œuvre en un billet sans la trahir, mais sachez a minima que :

Notre personnalité est définie par nos trois "sphères", Adulte, Parent, Enfant dont chacune d'entre elles intervient dans nos relations avec autrui,

Tout être a un besoin des autres que cela soit en recevant caresses ou gifles, ce que l'auteur appelle des "strokes" (double sens, caresse ou coup en anglais), un bébé mourra si, quoique bien nourri, il n'est pas câliné tous les jours (observations de Spitz).

Nous avons tous besoin de notre quota journalier de strokes,

Nos échanges avec autrui, en vue d'obtenir notre "dose" de strokes, s'appellent "transactions".

Les plus saines, et plus simples sont les transactions complémentaires; ex : Adulte "Quelle heure est-il ?" - Adulte "18h23", mais elles sont bien souvent croisées, en général c'est là où ça se gâte ; ex: Parent "Ce modèle est meilleur, mais trop cher pour vous" - Enfant "C'est bon, je le prends" ou encore Adulte "Où sont mes clefs de voiture ?" - Parent "Il faut toujours que tu égares tout !".
Ça vous rappelle des trucs ?

Une grande partie de notre temps est un temps "social" que nous remplissons / structurons par :
- le "retrait", comme son nom l'indique,
- des rituels, - "Bonjour, comment ça va? ", "Bien merci, il fait froid pour la saison", etc.,
- des "passe-temps", objet du présent billet,
- "l'activité", des fois , on bosse, tout simplement,
- des "jeux", dans lesquels, à la suite d'échanges négatifs ritualisés, les partenaires vont chercher à tirer un "salaire" de l'échange avec l'autre. Salaire pouvant être une autopunition ou un rabaissement de l'autre, j'y reviendrai un jour, on connaît tous ça, sans nécessairement pouvoir le définir.
- et enfin "l'intimité" qui est  un temps relationnel de proximité et d'échange authentique où les gens se montrent tels qu'ils sont. Moments rares s'il est besoin de le préciser.


Publié dans Psycho de bazar

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article